Sacrilège en terre elfique

Dans un lointain royaume, règne une atmosphère atypique. Une expédition composée d’humains a réussi – au terme d’un long voyage, à atteindre le « royaume interdit d’Aldrin. » Cependant, la réussite de cette expédition embête de beaucoup l’organisme chargé d’administrer la terre des elfes : le Haut-Conseil elfique, composé de Sept sages. Ses membres sont partagés. Il y a ceux qui proposent d’accepter la présence d’humains sur leur terre, et les autres qui désireraient chasser à jamais ceux qu’ils considèrent comme des impies. C’est ainsi, qu’au lever de la deux centième lune bleu, un procès qui s’annonce long débute. De ce procès, la majorité elfique espère que les humains seront bannis à jamais d’Aldrin. Les membres de l’expédition souhaitent se voir intégrés au sein de la prestigieuse communauté elfique d’Alabëyla.

  Ënyaëlle s’avança en direction de la reine Kementari Faëndel, et s’adressa à elle en ces mots :

  — Votre Sublime Grandeur, en tant que conseillère des Sept Ouvrages fondateurs, je demande audience.

  La reine était habituellement habitée par une grande indulgence. Mais ce jour-là, ses traits étaient crispés.

  — Soit. Tu as la parole Ënyaëlle.

  Celle-ci remercia la reine Kementari de l’attention qu’elle lui porta.

  — Comme vous le savez Votre Majesté, un groupe d’humains a pénétré notre terre sacrée. Il s’agit certes d’un acte hautement condamnable. Mais je souhaiterai attirer votre attention sur le fait que ces humains aient clairement manifestés leur intention pacifique. Dans ce cas, pourquoi les rejeter ? Leur expulsion n’aurait plus lieu d’être.

Une autre conseillère se leva du banc de l’Assemblée des Sept Sages et demanda la parole. La reine la lui accorda.

  — Votre Grandeur, je suis en désaccord avec l’opinion d’Ënyaëlle.

  Cette seule phrase provoqua une vague de murmures houleux dans le banc opposé, et une vague de murmures enthousiastes dans le banc où se trouvait celle qui avait parlé. Celle qui avait pris la parole n’était autre que la conseillère de la Nature Blanche : Nerwen.

  — Parle, lui ordonna la reine Kementari, afin que je prenne connaissance de ton opinion.

  Nerwen Palodëi était une elfe magnifique, son visage reflétait l’intense force de vivre qui l’animait. La couleur de ses cheveux tendait vers un bleu situé à la frontière du noir absolu.

La conseillère s’avança vers Ënyaëlle, et prit la parole avec l’accord de la souveraine.

  — Ma chère, vous dites que ces humains sont habités par de bonnes intentions. Soit. Mais en êtes-vous si certaine ? Avez-vous de solides preuves démontrant leur frêle innocence ? À l’évidence, non. Mais, venons-en au chef d’accusation qui – selon moi, leur incombe fatalement. En pénétrant en terre Tharanienne, les humains commirent un premier odieux sacrilège. Ils tuèrent sans vergogne d’innocents animaux, des biches pour être exact. J’en appelle à l’acte de barbarie pour qualifier ceci !

  En deuxième lieu, lorsqu’ils se remirent en marche vers notre capitale, ils piétinèrent le vaste champ de tulipes bleues de la ville de Gûn. Je reste affligée d’avoir eu connaissance d’un tel sacrilège ! Vous, ma chère Ënyaëlle, vous êtes aveugle en ce domaine. Ne voyez-vous donc pas leurs faux sourires innocents, leur air mesquin ? Ce sont eux que vous souhaitez voir intégrés dans notre société ?